De Véronique à Ariane : la saga des fusées européennes
Par Pascale MOLLARD-CHENEBENOIT

Il y a eu la petite Véronique, le précieux Diamant, la trop complexe Europa et puis la belle Ariane : depuis des décennies, l'Europe, et particulièrement la France, ont à cœur de participer à l'aventure spatiale et de disposer de fusées pour lancer leurs satellites.
- LA PETITE VERONIQUE
Après la Seconde Guerre mondiale, plusieurs pays européens, principalement les Français et les Britanniques, cherchent à développer des fusées.
La toute première fusée-sonde française s'appelle Véronique. Les premiers tirs ont lieu à partir de 1952 depuis la base de Hammaguir en Algérie. Sa mission : explorer la haute atmosphère. Plusieurs animaux (Hector le rat, Félicette le chat) sont lancés au début des années 1960 pour des expériences médicales. Placés dans des capsules, ils sont récupérés en bonne santé après une descente en parachute.
De leur côté, les Britanniques développent la fusée-sonde Skylark dont le premier tir a lieu en 1957.
- DIAMANT
La France lance en 1961 un programme « Pierres précieuses » pour se doter d'un lanceur de satellites.
En novembre 1965, la fusée française Diamant lance le satellite Astérix depuis Hammaguir. Elle est le fruit de la volonté du général de Gaulle d'assurer l'indépendance de la France dans le domaine spatial. Elle devient la 3e puissance spatiale, derrière les Etats-Unis et l'URSS.
Le dernier lancement de Diamant a lieu en 1975. Douze fusées ont été lancées au total (trois échecs), dont les dernières depuis la base de Kourou (Guyane).

- LE FIASCO D'EUROPA
Dans les années 1960, l'Europe développe un projet de lanceurs spatiaux, « Europa ». Dans la première version, les Britanniques apportaient le premier étage, la France le deuxième, l'Allemagne le troisième, l'Italie étant chargée de la coiffe et du satellite.
« Le tout ressemblait à une mauvaise blague, laquelle faillit se conclure tragiquement lorsque la tentative de lancement la moins infructueuse se termina par un impact en baie d'Hudson, après un survol de New York en 1970 », a raconté Yves Sillard, ancien directeur général du Cnes, l'agence spatiale française.
Compliqué et cher, Europa est un échec en raison d'un manque de coordination entre les pays et de l'absence d'un maître d'œuvre unique. Il est abandonné en 1973.
- LA FRANCE PREND LA BARRE
Pour éviter que l'Europe ne dépende des Etats-Unis pour lancer ses satellites, le président français Georges Pompidou relance la machine en 1972 en décidant d'aller vers un nouveau lanceur de satellites, le L3S. La France veut être maître d'oeuvre du projet et accepte de financer à 60% son coût de développement, ses partenaires européens dont l'Allemagne finançant le reste. Après de longues négociations, le principe du L3S est accepté en 1973. Développé dans le cadre de l'Agence spatiale européenne (Esa), créée en 1975, il prendra par la suite le nom plus séduisant d'Ariane.
- ARIANE
Le 24 décembre 1979, la fusée Ariane décolle de la base de Kourou, après un tir avorté quelques jours plus tôt. Ariane est au rendez-vous de l'histoire. Son épopée, ponctuée de succès commerciaux et de plusieurs échecs, peut commencer. Arianespace, société chargée de commercialiser les lancements, est créée en 1980.
Les versions d'Ariane se succèdent. Pour faire face à l'augmentation de la masse des satellites, le lanceur est entièrement refondu pour donner naissance à Ariane 5. Son premier vol en 1996 échoue. Six ans plus tard, une nouvelle version essuie aussi un échec. Mais depuis, tout roule. En novembre 2016, Ariane 5 a placé sur orbite quatre satellites de navigation Galileo, un 75e succès d’affilée, qui dépasse le record établi par Ariane 4 en 2003.
En décembre 2014, l'Europe spatiale a franchi une étape cruciale pour préserver son accès à l'espace en décidant de construire Ariane 6, une nouvelle fusée, plus compétitive, pour succéder à l'actuelle Ariane 5 et tenter de résister à une concurrence internationale féroce dans le lancement de satellites. Le programme, financé à 52% par la France, a reçu un feu vert définitif de l'Agence spatiale européenne à l'automne 2016. La fabrication d'Ariane 6 a démarré. Le premier vol est prévu en 2020.