Au pied de l'échafaud, le condamné déclare...

 

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Place de la Concorde (ancienne place de la Révolution), lieu d'exécution de Marie-Antoinette - Stephane de Sakutin - AFP
Place de la Concorde (ancienne place de la Révolution), lieu d'exécution de Marie-Antoinette. Stephane de Sakutin - AFP

Par Olivier RICHOU

A la vue du bourreau, nombre de condamnés ont protesté une dernière fois de leur innocence ou simplement laissé un dernier « bon mot ». Voici quelques uns de ceux que l'Histoire a retenus.

La reine Marie-Antoinette, montant à l'échafaud le 16 octobre 1793, aurait demandé pardon au bourreau Henri Sanson pour lui avoir malencontreusement marché sur le pied. Neuf mois plus tôt, inaudible dans le brouhaha, Louis XVI avait déclaré mourir « innocent ».

Certains ont peur. Réveillé à l'aube le 18 août 1876 à La Roquette, l'empoisonneur Gervais répète: « c'est impossible, c'est un crime que la société va commettre! »

Le 8 décembre 1793, Mme du Barry, dernière favorite de Louis XV, tente de gagner du temps : « Grâce, grâce, Monsieur le Bourreau! Encore une minute, Monsieur le Bourreau! »

Au fort de Montrouge, le 5 mai 1945, le commissaire Fernand David, patron des Renseignements généraux sous l'Occupation, qui va être fusillé, s'emporte en apercevant ses collègues : « Ah, Monsieur Airaud, Monsieur Lelièvre !.. Ainsi on vient voir mourir David ! On vient avec les copains se payer une bonne tranche de mort ! Eh bien David vous crache son mépris à la gueule ! Regardez-le bien mourir, David, et prenez une leçon, ça peut toujours servir quand on est flic ! »

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Portrait non daté de l'ancien chef du gouvernement de Vichy, Pierre Laval, fusillé le 15 octobre 1945 - AFP
Portrait non daté de l'ancien chef du gouvernement de Vichy, Pierre Laval, fusillé le 15 octobre 1945 - AFP

D'autres sont résignés. Pierre Laval, ancien chef du gouvernement de Vichy, devant le peloton d'exécution le 15 octobre 1945, s'adresse à son avocat : « A vous Naud, le résistant, je veux dire une chose avant de mourir : j'ai aimé mon pays autant que vous ».

Le 3 février 1832, à la Barrière Saint-Jacques, Désandrieux, condamné pour l'attaque nocturne et le meurtre d'un octogénaire, lance au bourreau : « dépêchez-vous! »

Enfilant son pantalon à l'aube du 14 octobre 1860, Jean-Jacques Adler, assassin de sa femme, déclare : « C'est bien malheureux, lorsqu'on est resté honnête homme jusqu'à 40 ans, de mourir sur l'échafaud ».

L'anarchiste Auguste Vaillant, guillotiné pour avoir jeté une bombe à la Chambre des députés, déclare, au pied de la guillotine, le 4 février 1894 : « J'ai voulu détruire la bourgeoisie, elle se venge, c'est son droit. Mort à la société bourgeoise, vive l'anarchie ! »

D'autres encore fanfaronnent. Louis-Dominique Cartouche, le 28 novembre 1721, apercevant l'échafaud où il doit être roué, observe : « Voilà un vilain aspect! »

Le député conventionnel des Vosges Jean-Baptiste Noël, montant à l'échafaud le 8 décembre 1793, un instant après Mme du Barry, l'ancienne maîtresse de Louis XV, demande à Sanson : « Avez-vous bien essuyé le couteau ? Il ne convient pas que le sang d'un républicain comme moi soit mêlé à celui d'une prostituée ».

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Photo non datée de la danseuse Mata Hari, fusillée le 15 octobre 1917 pour espionnage - AFP
Photo non datée de la danseuse Mata Hari, fusillée le 15 octobre 1917 pour espionnage - AFP

Danton, le 5 avril 1794, s'adresse au bourreau : « Tu montreras ma tête au peuple, elle en vaut la peine ! »

Le 28 avril 1794, l'amiral Charles-Henri d'Estaing, adversaire des Anglais dans la guerre d'indépendance américaine, arrêté comme « suspect », déclare : « Quand vous aurez fait tomber ma tête, envoyez-la aux Anglais, ils vous la paieront cher ».

Louis-Michel Alibaud, auteur d'un attentat contre Louis-Philippe en juin 1836, déclare sur l'échafaud qu'il meurt « pour le bien de l'humanité, pour l'extinction de l'infâme monarchie ».

Au moment d'être fusillée pour espionnage le 15 octobre 1917, Mata Hari répond à l'officier-greffier qui lui demande si elle a des révélations à faire : « Aucune, et si j'en avais, je les garderais pour moi ».

Quelques uns enfin, trouvent la force de faire de l'esprit. Ainsi, montant dans la charrette des condamnés le 22 avril 1794, Malesherbes trébuche et déclare : « Fâcheux présage, un Romain, à ma place, serait rentré chez lui ».

Pierre-François Lacenaire, l'assassin-poète, interpelle, au matin du 9 janvier 1836, le directeur de la prison de Bicêtre : « je vous salue, j'ai fait demander pour ce matin du papier et de l'encre, on a oublié. Ce sera pour demain ».

Le 21 avril 1913, alors que les survivants de la Bande à Bonnot vont être exécutés, Raymond Callemin déclare « C'est un jour sans lendemain » et Etienne Monnier refuse le dernier verre en disant « Je ne veux pas m'alcooliser ».