1885 : la conférence de Berlin fixe les règles du partage colonial de l'Afrique
Par Pierre GLACHANT
Dépêche diffusée le 24 février 1985 par l'AFP à l'occasion du centenaire de la Conférence de Berlin.
PARIS - 24 février 1985 (AFP) - Le 26 février 1885, « l'Acte général » de la Conférence de Berlin fixe les règles d'un partage colonial de l'Afrique qui sont, pour beaucoup d'historiens, à l'origine des problèmes frontaliers que connaît encore aujourd'hui le continent noir.
Conclu au terme de débats qui avaient débuté en novembre 1884, sous la présidence du chancelier allemand Otto Von Bismarck, cet « acte général » dispose que toute annexion de territoire par une puissance installée sur une côte africaine devait être matérialisée par une occupation effective et être notifiée aux autres parties signataires. Ces dispositions seront appliquées par la suite à l'intérieur des terres.
Parmi les quatorze nations représentées à Berlin, la France, la Grande-Bretagne et le Portugal étaient déjà engagés dans l'aventure coloniale, alors que d'autres comme la Belgique et l'Allemagne commençaient à manifester leur intérêt pour l'Afrique.
C'est d'ailleurs à la demande du roi des Belges, Léopold II, qui souhaitait voir l'influence de son pays sur le Congo reconnue par la communauté internationale, qu'est convoquée la conférence de Berlin. Le Congo est l'un des principaux sujets abordés.
En 1900, seulement une quinzaine d'années plus tard, toute l'Afrique, à l'exception du Maroc, de l'Ethiopie et du Liberia, est partagée entre les principales puissances européennes. A cette date, les frontières des empires coloniaux sont fixées et les puissances coloniales procèdent à des découpages, souvent arbitraires, à l'intérieur de leurs zones d'influence respectives.
Ces partages constituent l'héritage que trouvent les pays africains à leur accession à l'indépendance, au début des années soixante. Deux conceptions s'affrontent.
L'une préconise une révision des frontières. Elle triomphe provisoirement à la première conférence des peuples africains, réunie en 1958 à Accra, où les participants dénoncent « les frontières artificielles » et se prononcent en faveur de « l'abolition ou la rectification » de ces frontières.
Très vite, cependant, le second courant, en faveur du maintien des frontières héritées du colonialisme, commence à prévaloir. La charte de l'Organisation de l'unité africaine (OUA) de 1963 prévoit la « non ingérence dans les affaires intérieures des Etats » et le « respect de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de chaque Etat ». L'année suivante, les chefs d'Etat africains adoptent, dans leur quasi-totalité, le principe de l'intangibilité des frontières coloniales. Ce principe est régulièrement réaffirmé au sein de l'OUA.
Plusieurs conflits ayant pour origine le tracé des frontières n'en ont pas moins ensanglanté l'Afrique. C'est le cas notamment des deux guerres (1964 et 1977) qui ont opposé la Somalie à l'Ethiopie au sujet de l'Ogaden revendiqué par Mogadiscio.
Certains historiens estiment que la Conférence de Berlin est à l'origine de tous les conflits. D'autres estiment au contraire qu'on en a « surévalué » l'importance, et que les règles du partage colonial de l'Afrique avaient déjà commencé à être établies dès avant Berlin.