Quand les Jeux croisent la route de la géopolitique

Compétition universelle, les JO de l'ère moderne ont souvent été au centre d'enjeux diplomatiques ou rattrapés par la politique.
En 1936, les Jeux organisés à Berlin servent la propagande nazie et ils resteront un symbole fort d'instrumentalisation du sport par un régime.
Après une pause forcée de douze ans à cause de la Seconde guerre mondiale, les Jeux sont de nouveau organisés à Londres en 1948, mais l'Allemagne, l'Italie et le Japon ne sont pas invités par le CIO, pas plus que l'Union soviétique, absente depuis la révolution communiste de 1917. L'URSS n'intègrera les JO qu'en 1952 à Helsinki.
Les JO de Melbourne en 1956 vont particulièrement être affectés par le contexte international marqué par la crise du Canal de Suez, le conflit entre Israël et l'Egypte et l'invasion de la Hongrie par l'URSS. Les équipes soviétique et hongroise de waterpolo en viennent aux mains dans la piscine. Quarante-cinq athlètes hongrois passeront à l'Ouest après ces Jeux.

Le conflit israélo-palestinien va se déplacer à Munich en 1972 : l'attaque d'un commando palestinien contre le pavillon des athlètes israéliens et la riposte de la police allemande font 18 morts, dont 11 athlètes israéliens. Les Jeux s'interrompent puis reprennent le lendemain, mais plus personne n'y croit.
- L'ère des boycottes -
Les Jeux d'été de Montréal en 1976 sont boycottés par 22 pays africains qui protestent contre la présence de la Nouvelle-Zélande dont une équipe de rugby est partie en tournée quelques mois plus tôt en Afrique du Sud, où règne l'apartheid. Privée de Jeux depuis 1960, l'Afrique du Sud ne les retrouvera quant à elle qu'après la fin de l'apartheid en 1990.
Quatre ans après Montréal, les États-Unis boycottent les JO d'été de Moscou, en réaction à l'intervention soviétique en Afghanistan l'année précédente.

Ce boycott, qui vise à isoler l'Union soviétique en pleine Guerre froide, est suivi par des dizaines d'alliés des États-Unis. En tout, 65 pays déclinent l'invitation soviétique (Allemagne de l'Ouest, Canada, Japon ... ), dont certains pour raisons économiques.
En 1984, les pays du bloc soviétique, excepté la Roumanie, décident de boycotter les JO d'été de Los Angeles, en réplique au boycott de 1980. Quatorze États, dont Cuba, l'Allemagne de l'Est et la Corée du Nord, suivent le mot d'ordre.
En 2014, s'ouvrent les « Jeux de Poutine » à Sotchi, le plus grand événement en Russie depuis la chute de l'Union soviétique en 1991. Le président veut en faire un symbole majeur du retour de la grande Russie sur le devant de la scène internationale. Des appels au boycott se font entendre en particulier dans le monde occidental pour protester contre la répression des opposants politiques et des Russes homosexuels. Ni le président américain Barack Obama, ni le Premier ministre britannique David Cameron, ni le président français François Hollande n'assistent à la cérémonie d'ouverture.
- Les deux Corées -
Les relations belliqueuses entre les deux pays, séparés depuis 1945 et en guerre de 1950 à 1953, se sont souvent répercutées sur le terrain sportif.
En 1988, la Corée du Nord boycotte les Jeux d'été organisés par Séoul après avoir réclamé en vain une organisation conjointe avec la Corée du Sud.

Mais aux jeux d'été de 2000 (Sydney) et 2004 (Atlanta), ainsi qu'aux Jeux d'hiver 2002 (Salt Lake City) et 2006 (Turin), les deux pays défilent ensemble lors de la cérémonie d'ouverture, sur fond de réchauffement diplomatique. Les athlètes portent la même tenue, sous un drapeau coréen représentant la péninsule en bleu sur fond blanc.
C'est derrière cette bannière que les deux Corées défilent à nouveau conjointement en 2018 lors de l'ouverture des Jeux de Pyeongchang, en Corée du Sud. Séoul entend organiser les « Jeux de la paix » et va multiplier les épisodes symboliques de rapprochement avec son frère ennemi comme le premier match de l'équipe unifiée de Corée en hockey féminin.