Napoléon, stratège militaire d’exception

Par Daphné Benoit :

Napoléon a marqué l'histoire européenne par ses victoires militaires et ses talents de stratège comme le rappelle cette dépêche : 
PARIS, 30 avril 2021 (AFP) - Stratège d'exception, meneur d'hommes, auteur de multiples et foudroyantes victoires : Napoléon est installé depuis deux siècles au Panthéon de l'art militaire.

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Sosie de Napoléon durant la reconstitution de la bataille d'Austerlitz en décembre 2016 - Michal Cizek - AFP
ASosie de Napoléon durant la reconstitution de la bataille d'Austerlitz en décembre 2016. Michal Cizek - AFP

- Talent précoce -

Après une formation militaire à l'école de Brienne, le jeune Corse entame une carrière dans l'artillerie, point de départ d'une ascension fulgurante jusqu'à sa promotion au rang de général à seulement 24 ans.

Propulsé commandant en chef de l'armée d'Italie malgré son manque d'expérience, Bonaparte mène la campagne de 1796 contre les Autrichiens. Les batailles de Rivoli et du Pont d'Arcole, puis la campagne d'Egypte (1798), le hissent au rang de héros militaire.

Dès ses premiers pas de chef, il créé une relation étroite avec ses hommes, qu'il galvanisera sans relâche. « Soldats, vous êtes nus, mal nourris, le gouvernement vous doit beaucoup, il ne peut rien vous donner (...). Je veux vous conduire dans les plus fertiles plaines du monde. Vous y trouverez honneur, gloire et richesses », lance-t-il à ses troupes en Italie, en mars 1796.

- Changement d'échelle et rapidité -

L'empereur n'a laissé aucun ouvrage de référence sur sa pensée stratégique. Mais ses ordres aux armées, sa correspondance et ses manuscrits montrent la cohérence de son système.  
« On sort du blocage tactique de la fin de l'Ancien régime, à des combats en ligne figés, pour passer à un combat de plus en plus mobile, de mouvement. La force de Napoléon, c'est de l'avoir pensé à grande échelle », explique Michel Roucaud, responsable des fonds privés napoléoniens du service historique de la Défense.

Planification minutieuse, renseignements sur les mouvements adverses, supériorité en hommes et en matériel là où sera provoquée la rupture du dispositif ennemi, système de divisions, bivouacs légers, paquetage du fantassin allégé au minimum... Cette projection rapide - certaines unités parcourent plus de 40 km par jour - l'amène à surprendre son adversaire.

Ces atouts viennent parfois compenser l'infériorité numérique, comme à Austerlitz, une victoire écrasante signée le 2 décembre 1805 contre les forces de la coalition austro-russe.

Dans les jours qui précèdent cette bataille, Napoléon Ier convainc les forces de la coalition (91.000 hommes) commandées par le prince Koutouzov qu'il est en train de battre en retraite.

Il les attire en fait sur le terrain qu'il a choisi pour engager le combat avec ses 71.000 soldats : le plateau de Pratzen, à une centaine de kilomètres au nord de Vienne.

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Reconstitution de la bataille d'Austerlitz en République tchèque en décembre 2016 - Michal Cizek - AFP
Reconstitution de la bataille d'Austerlitz en République tchèque en décembre 2016. Michal Cizek - AFP

- « Voilà un brave ! » -

Le 1er décembre, alors qu'il est parfaitement au courant des mouvements de Koutouzov, l'empereur parvient à concentrer toutes ses forces dans la plus grande discrétion, les divisions de Bernadotte et de Davout se joignant à celles de Lannes, Soult et Murat.

Dans la journée, les troupes austro-russes gagnent le plateau de Pratzen où Napoléon les attend. Dans la nuit, l'empereur parcourt les bivouacs et explique la manœuvre à ses soldats : « les positions que nous occupons sont formidables et, pendant qu'ils marcheront pour tourner ma droite, ils me présenteront le flanc ».

Le 2 décembre, jour choisi par Napoléon pour livrer bataille, marque le premier anniversaire de son couronnement, les soldats allument des torches et acclament Napoléon aux cris de « Vive l'empereur, vive le petit tondu ».

A l'aube, dans le brouillard et le froid, les forces de Koutouzov entament leur marche pour déborder Napoléon sur son aile droite. A 9H00, le brouillard se dissipe, le « soleil d'Austerlitz » perce, Napoléon lance les divisions de Soult à l'assaut du plateau de Pratzen et coupe, comme prévu, en son centre l'armée de Koutouzov.

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Le bicentenaire de la bataille d'Austerlitz. Elise Menand - AFP

Malgré plusieurs contre-attaques de la garde impériale russe, le centre du dispositif de Koutouzov est enfoncé. Napoléon fait donner son artillerie sur les étangs gelés, où l'aile gauche de Koutouzov reflue.

La victoire française est totale. Les alliés comptent près de 20.000 morts, les Français, qui ont fait des milliers de prisonniers, moins de 9.000 morts et blessés.

Le lendemain, Napoléon écrit à son armée: « soldats, je suis content de vous. Il vous suffira de dire " J'étais à la bataille d'Austerlitz " pour que l'on réponde " Voilà un brave ! " ».

De trop vastes campagnes, en Espagne puis en Russie viendront à bout de la légende. Lors de l'ultime bataille, à Waterloo le 18 juin 1815, Napoléon n'est plus l'homme perspicace qu'il était. Sa défaite signe sa chute politique et son exil définitif.