Greta Thunberg, la jeune voix du climat
Par Camille BAS-WOHLERT
La suédoise Greta Thunberg est le symbole d'une génération en lutte contre le changement climatique :
Stockholm (Suède), 18 octobre 2022 (AFP) - Regard bleu et traits juvéniles : Greta Thunberg est le visage d'une génération hantée par l'urgence climatique, un combat qui lui a valu une pluie de récompenses et de nombreuses injures.

« Assez de blablabla », « comment osez-vous ? », « je veux que vous paniquiez » : avec quelques phrases chocs cette jeune suédoise est devenue l'agitatrice en chef de la cause climatique, accusant les responsables politiques de tourner en rond avec des promesses vagues sur l'indispensable réduction des émissions de CO2.
Lorsqu'elle s'assied devant le Parlement suédois un vendredi d'août 2018 avec son carton « Grève de l'école pour le climat », Greta a 15 ans et elle est seule, adolescente anonyme dans un monde qui à ses yeux se meurt en silence.
Dès l'automne, les médias commencent à s'intéresser à elle, son nom et ses photos se propagent sur les réseaux sociaux. En quelques mois, de Berlin à Sydney, de San Francisco à Johannesburg, la jeunesse lui emboîte le pas. Le mouvement « Fridays for Future » est né.
Fille d'une cantatrice et d'un acteur devenu producteur, voilà Greta Thunberg catapultée porte-voix d'une jeunesse saturée d'images d'une Terre en perdition.
D'autres croient percer à jour une marionnette des « collapsologues » ou un agent rémunéré du « lobby vert ».
- Fifi Brindacier -
« Certaines personnes répandent des théories du complot, disent que je ne pense pas ou ne parle pas par moi-même, ou qu'une autre personne écrit mes discours », dénonçait-elle à l'AFP en 2020 lors de la présentation à Venise du documentaire « I am Greta ».

Elle s'y décrit comme une ado « intello et timide », écrasée par la responsabilité.
Ses détracteurs raillent sa jeunesse ou décrédibilisent son action, quand ils ne soulignent pas sa pathologie - elle souffre du syndrome autistique d'Asperger et ne l'a jamais caché.
« Honnêtement, je ne comprends pas pourquoi les adultes devraient choisir de passer leur temps à se moquer et à menacer des adolescents et des enfants qui promeuvent la science », se défend-elle. « Etre différent n'est pas une maladie ».
Née à Stockholm en janvier 2003, la jeune fille, souvent comparée à la populaire héroïne suédoise Fifi Brindacier qui défie l'autorité des adultes, a commencé à s'intéresser au climat à l'école, vers « huit ou neuf ans ».
« Mes professeurs m'ont dit que je devais économiser du papier et éteindre les lumières. Je leur ai demandé pourquoi et ils m'ont répondu qu'il y a quelque chose qu'on appelle changement climatique », raconte-t-elle à l'AFP.
L'enfant renonce à la viande, au lait, aux produits neufs. Sa famille prend conscience de son hypersensibilité à ces questions lorsqu'elle tombe malade, à 11 ans.
Elle arrête alors de s'alimenter, d'aller à l'école, se mure dans le silence. Sa dépression soignée, elle reprend le chemin des cours mais la famille change radicalement de vie, abandonnant notamment l'avion.
Sa dernière année de collège est en pointillés, ponctuée de nombreux voyages - en train - à travers l'Europe. Pour se consacrer entièrement à sa cause, elle décide de prendre une année sabbatique et embarque à bord d'un voilier en août 2019 pour franchir l'Atlantique.
- Réactions fiévreuses -
Devant des dizaines de chefs d'Etat et les télévisions du monde entier, les yeux remplis de larmes, la voix étranglée par l'émotion, elle tient devant l'Assemblée générale de l'Onu sur le climat un discours qui suscitera une avalanche de réactions fiévreuses.
« Comment osez-vous? Vous avez volé mes rêves et mon enfance avec vos paroles creuses », lance-t-elle.
La pandémie de Covid-19 complique ses voyages et renvoie le climat au second plan, tout comme l'invasion russe de l'Ukraine.
Tous les vendredis matins, elle continue toutefois à brandir sa pancarte devant le Parlement suédois.
Greta Thunberg « n'apporte pas de solution » concrète au réchauffement, reconnaît Erik Helmerson, éditorialiste au quotidien suédois Dagens Nyheter. Mais « on n'aurait jamais parlé autant du climat sans elle ».