Le 17 juin 1939, la dernière exécution publique fait scandale

 

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L'exécution d'Eugen Weidmann le 17 juin 1939 - AFP
L'exécution d'Eugen Weidmann le 17 juin 1939 - AFP

Le 17 juin 1939, à Versailles, la foule attend autour de la guillotine, dressée devant la prison Saint-Pierre, l'exécution de l'assassin Eugen Weidmann. A cause de débordements dans l'assistance, les autorités françaises décideront de ne plus procéder à des exécutions en public.

Depuis les temps anciens, l'exécution capitale était un spectacle, une mise en scène de la souveraineté du pouvoir, supposée avoir une valeur dissuasive « pour l'exemple », flattant en même temps la curiosité morbide et la soif de vengeance des foules.

Même si au 20e siècle les mises en scène comme au temps de la Révolution - défilés des charrettes des condamnes à travers la ville vers l'échafaud - ont été abandonnées, les exécutions restent publiques, jusqu'en 1939.

Le protocole règle tous les détails. L'exécution est matinale, habituellement avant le lever de jour. En plein milieu de la nuit, les assistants du bourreau apportent les « bois de justice » et assemblent la guillotine, le plus souvent devant les portes de la prison.

Ensuite, le directeur de la prison, accompagné du juge d'instruction, du commissaire de quartier, d'un médecin et d'un aumônier réveillent le condamné. On l'informe que son recours en grâce est rejeté et qu'il doit se préparer à mourir.

Il a la possibilité d'exprimer un dernier vœu, de faire une dernière révélation au juge et de s'entretenir avec le prêtre. Il a également droit à un verre d'alcool et une dernière cigarette.

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Weidmann franchit la porte de la prison, soutenu par le bourreau - AFP
Weidmann franchit la porte de la prison, soutenu par le bourreau - AFP

Au cours de la « dernière toilette », on coupe ses cheveux et dégage le cou en échancrant sa chemise. Pieds entravés et mains liées dans le dos, le supplicié est laissé aux mains du bourreau.

Dans la lumière blafarde du petit matin, il aperçoit à peine la guillotine avant d'être sanglé sur la planche. Entre le réveil du condamné et la chute du couperet ne se passe généralement pas plus d'une demi-heure.

Ce même rituel est prévu pour l'exécution d'Eugen Weidmann, un Allemand de 31 ans, condamné pour six assassinats commis en France.

Son exécution, le 17 juin 1939, doit se dérouler à l'entrée de la prison Saint-Pierre dans le centre de Versailles, tout près de l'Hôtel de Ville et de l'actuel Palais de Justice de la cité royale. Mais les événements prennent une tournure imprévue.

Les préparatifs sont en retard et, en cette journée de début d'été, le soleil est déjà haut dans le ciel quand Weidmann est escorté à l'échafaud. La malle en osier, qui devra récupérer sa dépouille, est ouverte au pied de la guillotine, dressée à même le trottoir.

La lumière du jour permet aux reporters de prendre un grand nombre de photos et même des images filmées, la plus importante série de clichés d'une exécution jamais réalisée.

Dès la veille, les gens s'étaient rassemblés, les uns pour être aux premières loges, les autres pour dénoncer un spectacle qu'ils jugent indigne d'une société civilisée.

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Exécution d'Eugen Weidmann, le 17 juin 1939 à Versailles - AFP
Exécution d'Eugen Weidmann, le 17 juin 1939 à Versailles - AFP

La foule déborde le service d'ordre, quelques personnes se ruent vers la guillotine pour tremper leur mouchoir dans le sang. Dans l'assistance se trouve Christopher Lee, future vedette de films d'horreur, alors âgé de 17 ans. Dans son autobiographie, l'acteur anglais témoigne de l'événement.

Les comportements des journalistes et de la foule hystérique provoquent un vif émoi au plus haut sommet de l'État. D'autant plus que le malaise vis-à-vis du déploiement public de la peine de mort est déjà installé depuis plusieurs décennies.

Sur la base d'un rapport du chef du gouvernement Edouard Daladier, constatant que les exécutions capitales sur les « places publiques » n'ont pas eu « l'effet moralisateur » attendu, mais « pratiquement donné des résultats opposés », le Président de la République Albert Lebrun supprime la publicité de la mise à mort.

Une semaine après les incidents de Versailles, est promulgué le décret du 24 juin 1939, qui dispose que « l'exécution se fera dans l'enceinte de l'établissement pénitentiaire » et que seulement neuf personnes seront autorisées à assister à l'exécution.

Jusqu'à son abolition, la mise à mort sera confinée dans le secret des cours des prisons.